Marie d’Édimbourg-Saxe-Coburg-Gotha est née le 29 octobre 1875 à Eastwel Park, Kent, Grande-Bretagne, comme fille d’Alfred, duc d’Édimbourg, le deuxième fils de la reine Victoria de Grande-Bretagne et de la grande-duchesse Maria, la seule fille du tsar Alexandre II de Russie et de la princesse Maria de Hesse.
En janvier 1893, la princesse Marie arrive à Bucarest, comme épouse du prince Ferdinand, l’héritier de la couronne roumaine.
Si immédiatement après son arrivée en Roumanie, la princesse héritière s’appelait “La Princesse Lointaine”, parce qu’elle ressemblait à une plante pas encore acclimatée aux terres du pays, au fil du temps, la princesse Marie a appris à mieux connaître la Valachie. Et pas seulement dans ses charmantes apparences, mais, ce que peu de gens connaissent, dans l’essence même des choses et des personnes. C’est pourquoi, dans les moments de restriction du refuge à Iasi, lorsque sa dignité de reine et même sa vie étaient menacées, elle a déclaré : « Je n’ai pas d’autre patrie que la Roumanie. Je ne me séparerai pas. »
La façon de vivre de la reine Marie porte l’empreinte de sa conception de la royauté. Dans ce concept, on peut reconnaître la tradition anglo-saxonne, dans laquelle elle a été éduquée, combinée à des éléments celto-balto-scandinaves, proches de son âme de “dernière romantique”, mais aussi l’orthodoxisme autochtone du gouvernement de type monarchique. Le point nodal dans la définition de la royauté était, pour Marie, le caractère sacré de cette institution. Le vieux concept anglo-saxon s’identifie à celui orthodoxe du Seigneur, comme « l’oint» de Dieu. Le souverain devrait être, selon cette théorie, un modèle de sagesse, de patience et de bienveillance. Il incarnait la majesté, la puissance et la solennité de l’institution royale. C’est pourquoi la croix patriarcale, symbole de la règle sacrée, apparaît à plusieurs reprises parmi les éléments décoratifs du château de Pelișor.
En cherchant la beauté dans toutes ses formes, Maria avait aussi une autre façon d’affirmer sa personnalité: celle artistique. Sa création littéraire comprend des récits, des évocations, des romans, des mémoires. Nous ne citerons que quelques titres : « Mon pays », « Le rêveur de rêves », « Une légende du Mont Athos », « L’histoire d’une dame désobéissante », « Pensées et icônes du temps de la guerre », « L’histoire de ma vie ». Les œuvres littéraires ont été écrites en anglais et traduit en roumain, certaines traductions appartenant au grand historien Nicolae Iorga.
Elle-même peintre de talent, Regina Marie a fondé une société artistique, intitulée “Jeunesse Artistique”. Cette société comprenait, parmi ses membres, de précieux artistes visuels de l’entre-deux-guerres: Ștefan Luchian, Ștefan Popescu, Kimon Loghi, Samuel Mutzner, Elena Popea, Marius Bunescu, Costin Petrescu, A. Verona, N. Vermont, A. A. Ionescu, Ipolit Strâmbu et d’autres.
Devenue souveraine en septembre 1914, la reine Marie s’implique dans la vie politique du pays, avec tact et audace. Elle eut un rôle décisif dans la création de la Grande Roumanie, étant à la tête du courant philo-antantiste, en tant que conseiller du roi Ferdinand.
Pendant son refuge à Iasi, elle vit avec courage le calvaire de la guerre, sans perdre un seul instant la foi dans la victoire. La “Mère des blessés” impressionnait par son énergie inépuisable et son courage, prouvés notamment dans les hôpitaux moldaves, remplis de patients atteints du typhus exanthématique. Plus tard, elle écrira dans ses « Mémoires » : « Je suis resté plusieurs jours parmi mes soldats et Dieu m’a permis d’être d’une certaine aide ; des jours de labeur terrible, des jours d’obscurité, où ce que je voyais étaient des choses que je ne pourrai jamais oublier”.
Le 15 octobre 1922, elle eut la grande joie de participer, avec son mari, au Couronnement à Alba-Iulia. Avec la couronne sur la tête et le long manteau, la reine Maria ressemblait aux impératrices byzantines, mais aussi aux dames roumaines du XVIe siècle.
À la mort du roi Ferdinand en 1927, son petit-fils Michel, âgé de 6 ans, devient souverain. Le prince Nicolae, le patriarche Miron Cristea et Gheorghe Buzdugan, président de la Cour de Cassation, faisaient partie du Conseil de Régence. En 1930, Charles, le fils aîné de la reine Marie, revient de Paris et détrôné son fils.
Le roi Charles II isole sa mère dans la résidence, le palais Cotroceni. Eloignée de la vie politique du pays, la reine Marie vivait dans un exil volontaire, dans sa villa de Balchik, où on la voyait portant sur la tête un voile blanc, couleur des reines veuves, noué à la manière monastique.
La santé de Marie commence à se détériorer et en 1938, elle se rend dans une clinique de Dresde pour se faire soigner. Apprenant des médecins que la fin était proche, elle décida de retourner au pays et, le 18 juillet 1938, passa dans l’éternité dans la Chambre Dorée du Château de Pelișor, décorée elle-même avec les symboles de foi, de lumière et de vie éternelle, qu’elle aimait. Dans son testament moral – “Lettre adressée à mon pays et à mon peuple” – la reine Marie a adressé des adieux émouvants au peuple avec lesquel elle s’était identifiée : “Désormais, je ne pourrai vous envoyer aucun signe ; mais surtout, souviens-toi de Mon Peuple que Je t’ai aimé et que Je te bénis avec mon dernier souffle ».